À l’Espace Mendès France
9h30-12h30. Contextualisation culturelle et historique
« Le sang des règles : le signe d’un corps déficient en bonne santé. Le regard des médecins de la collection hippocratique »
Lydie Bodiou, maître de conférence en histoire grecque, université de Poitiers laboratoire HERMA.
Spécialiste de l’histoire des femmes et du genre, particulièrement de l’histoire du corps, des représentations et des violences.
Dans l’Antiquité grecque, le sang c’est la mort sur le champ de bataille, l’hémorragie que l’on ne sait juguler, le sang répandu lors du sacrifice qui rassasie les dieux, un sang qui souille les vivants en risquant de les contaminer. Or les femmes produisent ce sang, en trop-plein, un sang qui s’échappe d’elle sans qu’elle puisse le maîtriser et pourtant ce sang-là n’est pas mortifère. Au contraire il est à l’origine de la reproduction. Cette spécificité physiologique est d’une importance essentielle pour comprendre non seulement l’altérité du féminin aux yeux des hommes (particulièrement ici les médecins de la collection hippocratique qui élaborent une véritable science du sang menstruel), mais aussi l’étrangeté dans laquelle leur corps les enferme. Loin d’être un atout, ce sang va les stigmatiser dans leur infériorité congénitale.
Quand la science valide les préjugés. Les médecins et les règles XIXe-XXe siècle.
Jean-Yves Le Naour, historien. Spécialiste de l’histoire des femmes, auteur notamment de Histoire de l’avortement (Seuil. 2003), Quand le viol devint un crime (Vendémiaire, 2023).
Les préjugés, les religions et les superstitions ont ancré pour longtemps l’idée d’impureté des femmes, tout particulièrement durant la période des règles. La révolution scientifique du XIXe siècle va-t-elle changer les choses ou confirmer les préjugés par des arguments raisonnés ?
« Les tentes rouges : Ritualiser pour valoriser les « étapes de la vie d’une femme »
Adèle Michaud, doctorante en sociologie, université de Tours, UMR 7324 Citeres.
Les tentes rouges sont des espaces dédiés à la parole autour des « maux de femmes », des menstruations et du corps. Ce cadre permet aux femmes rencontrées de célébrer et donner un sens à ces expériences, les liant à leur identité de femme, elles qui, avant, « n’aimaient pas être femme ».
« Les anthropologues face au tabou des règles »
Mounia El Kotni, anthropologue de la santé.
Comment les femmes puis leurs corps peinent à intégrer les thématiques de recherche de l’anthropologie ? Tour d’horizon des difficultés à aborder la dimension politique d’événements quotidiens comme les règles, la contraception ou le postpartum.
14h-15h30. Biopolitique. Médicalisation, maladies : la fabrique du corps menstrué.
« De la normalisation à la pathologisation : les règles dans l’endométriose »
Margaux Nève, doctorante en sociologie, École des hautes études en sciences sociales – IIAC.
Dans le cadre de cette présentation et de l’étude de l’endométriose je tâcherai d’analyser comment l’approche médicale autour des règles peut être perçue comme paradoxale : d’une part, les douleurs menstruelles sont normalisées, d’autre part, les menstruations sont centrales pour comprendre et prendre en charge la maladie et la pathologisation du corps féminin.
« Invisibilité des règles dans le soin en dehors de leur pathologisation »
Pour une M.E.U.F. (Pour une médecine engagée, unie et féministe).
Regards croisés d’une infirmière en dehors de la gynécologie, et d’une sage-femme qui y évolue en permanence, sur l’invisibilité des menstruations normales à l’hôpital et dans les parcours de soins.
« Le physiologique est politique: la production sociale de la ménopause, un processus en mouvement »
Cécile Charlap, maîtresse de conférences en sociologie, université Toulouse Jean Jaurès, chercheuse au laboratoire Interdisciplinaire solidarités, sociétés, territoires.
La ménopause, catégorie médicale historiquement et culturellement située, s’inscrit dans le système des rapports sociaux de sexe. En participant à la construction du vieillissement reproductif féminin et dans le registre de la déficience et de la disqualification, elle est aujourd’hui un enjeu de définition et de contestation dans le contexte des féminismes actuels.
16h-17h30. Nouveaux horizons, nouvelles luttes
« Concevoir des ateliers d’auto-observation gynécologique en groupe – Retour d’expérience »
Cluny, membre des Flux.
Cluny a lancé en 2015 Le journal de ma chatte dans lequel elle documentait en vidéo les évolutions quotidiennes de son cycle menstruel. De cette expérience est né un collectif : Les Flux, et une newsletter féministe sur les règles et l’auto-gynécologie. Depuis 2016 le collectif tente de favoriser la réappropriation des connaissances gynécologiques et organise des ateliers d’auto-observation en groupe. Nous reviendrons sur la genèse de ces groupes, leur déroulement ainsi que leur évolution.
« Précarité menstruelle »
Marguerite Nebelsztein, Collectif Georgette Sand.
Le collectif Georgette Sand défend l’idée qu’on ne devrait plus s’appeler George pour être prise au sérieux. Il s’attache à déconstruire les stéréotypes, renforcer la capacité d’émancipation des femmes et à améliorer leur visibilité dans l’espace public afin que dès l’enfance, filles et garçons puissent connaître la diversité de celles qui composent ce monde. En 2015, le collectif a obtenu la baisse de la TVA sur les protections périodiques de 20% à 5,5% et réalise régulièrement des ateliers sur la précarité menstruelle auprès de public jeune ou précaire. Le collectif a sorti Ni vues ni connues en 2017.
« Militer avec l’endométriose, enjeux et perspectives »
Laurie Rousseville, militante et chercheuse indépendante.
À partir d’un ancrage militant, on réfléchira aux enjeux des luttes à mener dans l’endométriose, dans une perspective féministe et de lutte des classes.
« Les effets de la transphobie dans les parcours de santé »
Clément Moreau, psychologue et militant EST (Espace santé trans).
Tour d’horizon des limitations des approches médicales et psychologiques pour les personnes trans et non binaires en santé globale, sexuelle et mentale du fait d’une approche cis-centrée et des alternatives existantes.
18h30-19h30. Conférence Ceci est mon sang : se réapproprier le récit sur les menstruations
Élise Thiébaut, journaliste, autrice féministe – en duplex
Le tabou des menstruations opère un hold-up symbolique sur le sang de celles qu’on désigne ainsi comme femmes, à travers des mythes et des superstitions qui perdurent encore aujourd’hui. À partir du moment où l’on se réapproprie ce récit, on renverse la vision patriarcale du féminin et on ouvre la porte à d’autres possibles, y compris dans une perspective écoféministe.